Comment peut-on être sorcier ?

How can one be a wizard?

Au sujet d’une œuvre majeure de Joaquin FERRER.
About a major artwork by Joaquin FERRER.

« […] Quant aux jeunes, je les plains. Comment n’ont-ils pas l’impression que tout a été fait avant eux ? On a tort d’en faire des dieux avant même qu’ils aient eu le temps de s’exprimer. L’un d’eux, Ferrer, est un peu ma découverte. Loin du Pop Art, du Mec’Art et de leurs succédanés, il me paraît profondément authentique […] »

— Max Ernst

Joaquin Ferrer - Le sorcier, 1980

S’inscrivant dans une abstraction lyrique par son foisonnement et géométrique par sa solide construction, Joaquin FERRER, un des plus importants artistes latino-américains vivants, nous offre avec son « Sorcier » une figure d’une forte présence mais qui garde une sorte d’aura de mystère.

Où est donc le sorcier dans cette composition ? Est-ce la figure rouge au centre de l’œuvre ? Sont-ce ses yeux qui, en bleu, scrute l’amateur d'art et ne voit-on alors de lui que son visage ? Ferrer nous livre une figure réaliste au sens où un maquettiste très habile pour ne pas dire virtuose pourrait sans doute la réaliser. Mais il nous délivre aussi un espace instable, où tout semble à la fois ordonnancé et impossible à appréhender.

Ce sont probablement là les caractéristiques du sorcier : il s’empare du réel pour le soumettre à l’irrationnel. Sa pensée et ses pouvoirs empruntent des formes et chemins tortueux mais c’est pour mieux nous prendre dans ses rets.

Sa composition est vigoureuse, son sens des oppositions de couleur impressionnant. FERRER et son sorcier parviennent à innover dans l’abstraction alors que cela semble de nos jours si difficile, ce qu’avait déjà perçu Max ERNST.

Né le 4 juillet 1929 à Manzanillo, peintre, dessinateur et graveur cubain, après avoir étudié à l’École des Beaux‐Arts de La Havane, il fait l’objet chaque année, entre 1954 à 1958, d’une exposition personnelle au salon annuel du Musée d’Art moderne de la capitale cubaine. En 1960, le Ministère de l’Éducation lui accorde une bourse pour aller étudier à Paris.

Il décide d’y rester et finira par bénéficier, après de nombreuses expositions, d’une mémorable retrospective à la Maison de l’Amérique latine en 2016, boulevard Saint-Germain, consacrant son statut d’artiste parmi les plus importants issu du monde sud-américain.

Dédaigneux des modes et des a priori il construit une œuvre dense et singulière, d’une forte puissance décorative au bon sens du terme.

Pour celles et ceux qui voudraient découvrir d’autres aspects de son œuvre une visite sur son site personnel sera d’un grand intérêt : https://joaquinferrer.org.

"...] As for the young people, I feel sorry for them. How can they not have the impression that everything has been done before them? It is wrong to declare them gods before they have even had time to express themselves. One of them, Ferrer, is a bit my discovery. Far from Pop Art, Mec'Art and their substitutes, he seems to me deeply authentic [...] ".

- Max Ernst

Joaquin Ferrer - Le sorcier (The Sorcerer), 1980

Joaquin FERRER, one of the most important living Latin American artists, offers us with his "Sorcerer" a figure with a strong presence but which keeps a kind of aura of mystery, in a lyrical abstraction by its abundance and geometric abstraction by its solid construction.

Where is the sorcerer in this composition? Is it the red figure in the center of the painting? Is it his eyes, in blue, that scrutinize the art lover and do we only see his face? Ferrer delivers a realistic figure in the sense that a very skilled modeler, not to say virtuoso, could probably achieve. But he also gives us an unstable space, where everything seems both ordered and impossible to apprehend.

These are probably the characteristics of the sorcerer: he seizes reality to subject it to the irrational. His thought and his powers take tortuous forms and paths, but it is to better catch us in his clutches.

His composition is vigorous, his sense of color oppositions impressive. FERRER and his sorcerer manage to innovate in abstraction when it seems so difficult nowadays, which Max ERNST had already perceived.

Born on July 4, 1929 in Manzanillo, Cuban painter, draughtsman and engraver, he was the subject of an annual solo exhibition at the Museum of Modern Art in the Cuban capital between 1954 and 1958 after studying at the School of Fine Arts in Havana. In 1960, the Ministry of Education granted him a scholarship to study in Paris.

He decided to stay there and, after numerous exhibitions, ended up with a memorable retrospective at the Maison de l'Amérique latine in 2016, on Boulevard Saint-Germain, consecrating his status as one of the most important artists from the South American world.

Disdainful of fashions and preconceptions, he has built up a dense and singular body of work, with a strong decorative power in the best sense of the term.

For those who would like to discover other aspects of his art, a visit to his personal website will be of great interest: https://joaquinferrer.org.

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